MISE A JOUR : 09/04/2009 13:32

 

Cette page est dédié à l'équipage exceptionnel à l'armement du Sous Marins BÉVEZIERS

Une pensée à nos camarades disparus

Photos de BERNARD GOUESBET

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LE SOUS-MARIN BÉVEZIERS : FILLEUL DE

LA VILLE DE CAEN (1977-1997).

Caen : ville marraine.

Créer, équiper. entretenir une flotte de guerre a toujours été pour un État synonyme de dépenses majeures. Sous le règne de Louis XV 

( 1610-163), afin de contourner, en partie cette difficulté. il fut décidé de demander aux villes et aux provinces du pays de contribuer financièrement à la construction de navires de guerre. En échange ces généreux donateurs voyaient leur nom orner la proue de leur filleul et sillonner les mers du globe. C'est ainsi que plusieurs de nos grands vaisseaux de ligne portèrent les noms de Bourgogne, Normandie, Provence, Bretagne, Ville de Paris.

Cette idée a évolué avec le temps. L'aspect financier de l'opération a disparu au profit de données plus relationnelles, voire plus sentimentales: les parrainages sont désormais l'occasion d'établir des liens privilégiés entre les marins et leurs concitoyens. Les villes côtières sont souvent des marraines recherchées mais y trouve aussi bon nombre de villes intérieures. Aujourd'hui, quasiment tous les bâtiments de la Marine nationale sont parrainés par une ville ou un Conseil générai, de France métropolitaine ou d'outre-mer. Dans le cadre de la refonte de notre système de défense. cette notion retrouve toute sa force: le lien Armées Nation, Marine Nation passe en partie par ce genre de rencontres. Des liens d'amitié, de solidarité doivent plus que jamais être tissés entre nos différents équipages. nos villes et les citoyens.

Ouistreham et Caen se trouvent être ou avoir été marraines. Ainsi, à l'entrée de Caen, par la route de Falaise, un singulier panneau d'information composé d'une ancre et d'une clef croisées. témoigne de cette réalité. Il y est inscrit : "Caen : ville marraine du sous-marin Bëre_ ier'". Seuls les érudits comprendront la signification de ce lien entre une ville et un sous-marin.

I) Le second Béveziers.

Le 16 avril 1977, il y a donc vingt ans, à 12 heures, une cérémonie solennelle avait lieu en la mairie de Caen, en présence des autorités civiles et militaires, de tout l'équipage du sous-marin Béveziers, ainsi que de l'ensemble du Conseil municipal. Le Sénateur Maire de la ville, Monsieur Girault, et le Capitaine de Corvette, Royer de Véricourt, commandant du bâtiment, échangeaient le précieux parchemin de parrainage qui consacrait l'adoption par la cité de son filleul. Près d'eux, se tenait Monsieur Jaeckert, le très actif président de I'AGAASM 1, qui fut à l'origine de ce rapprochement. Il profitait d'ailleurs de cet instant, pour remettre à l'Hôtel de ville une maquette du

association Générale Amicale des ancien des Sous-marins.

Béve:iers2, réalisée par M. Michel ancien sous-marinier. Depuis le début des années 1970 cette association n'a pas ménagé ses efforts pour faire avancer ce projet.

A l'origine se trouve des discussions informelles entre plusieurs membres ayant habités Caen avant la Seconde guerre mondiale. Le souvenir ému d'une (voire de plusieurs) visite de sous-marins dans le port, ou d'autres types de bâtiments, l'existence de chantiers navals à Blainville entretenaient le désir de renouer avec ce passé. La réussite des escales organisées entre 1973 et 1976, avec les venues alternées des sous­marins Dauphin, Morse, Narval, Sirène, a fait prendre conscience de l'importance des liens existants entre la Marine nationale et les Caennais. Dès lors, Monsieur Jaeckert et la ville n'ont eu de cesse de structurer un parrainage. Le préfet maritime consulté, se déclare hostile à la venue d'un sous-marin de façon régulière à Caen, préférant un dragueur océanique.

 

Finalement, après plusieurs courriers et appels téléphoniques, l'état-major de la Marine donnait son accord pour la réalisation du parrainage entre Caen et un tout nouveau type de sous-marin d'attaque Agosta, nom du prototype alors en construction, à Cherbourg. Mais, la construction prenant du retard, il fut remplacé au dernier moment, par son petit frère nouvellement lancé : le Béveziers. Le hasard de ce changement faisait plutôt bien les choses.

 

A la lecture des journaux du mois d'avril 1977 nous pouvons constater combien les Caennais furent sensibles à ce rapprochement. L'originalité de se parrainage, les spécificités de la sous marinade, la convivialité, le dynamisme de l'AGAASM et des autres associations liées au monde maritime, la régularité des visites effectuées par le Béveziers, ont largement contribué à la pérennité de cette première rencontre. Il y eut des escales plus marquées que d'autres, comme l'année du congrès international des anciens sous-mariniers (1985), ou plus de 500 invités venus du Royaume-uni, de Russie, d'Italie, d'Allemagne, se retrouvèrent. Le Béveziers, après être venu à Caen, vint prendre "un pied de pilote" devant Deauville, en attendant que tous les congressistes viennent à sa rencontre au large avec tout ce que les environs comptaient de navires (environ 60). Devant cette nombreuse assistance, une émouvante cérémonie, à la mémoire des anciens sous-mariniers disparus, put avoir lieu. En 1984, comme en 1994, à l'occasion du quarantième et du cinquantième anniversaire du Débarquement alliés sur les côtes bas-normandes, il était toujours présent. A chacune de ses visites (huit entre 1977 et 1996), ce bâtiment et son équipage ont su resserrer les liens avec leur marraine. Nombreux sont les Caennais (près de 8 000 à 10 000 selon la presse) qui peuvent affirmer être descendus dans ses entrailles et avoir partagé quelques instants l'exiguïté des lieux avec l'équipage. Il faut bien dire que ses dimensions n'en font pas un palace flottant.

Sous-marin d'attaque à propulsion classique, il fut mis sur cale, en mai 1973 à Cherbourg, devenant ainsi la quatre-vingt unième unité produite par cet arsenal. Il est le second d'une série de quatre Agosta, Béveziers, La Praya, Ouessant dont l'autorisation de mise en chantier fut signée par Monsieur Michel Debré, Ministre d'État chargé de la Défense nationale, en juin 1971. Lancé le 14 juin 1975, il est présenté aux essais à la mer en mai 1976, et admis au service actif le 27 septembre 1977, soit quelques mois après la cérémonie de parrainage.

 

Ces principales caractéristiques sont

 

DIMENSION Longueur 67,57 mètres Largeur 6,80 mètres. Hauteur   11 mètres

 

TIRANT D'EAU                                            5,40 mètres

 

VITESSE maximale (en plongée) supérieure à 20 noeuds; 11 noeuds en surface.

 

DISTANCE FRANCHISSABLE                   7000 nautiques en plongée à 10 noeuds au schnorchel.

 

DÉPLACEMENT                   En surface         1490 tonnes.

En plongée        1790 tonnes.

 

PROPULSION                       Deux moteurs diesel SEMT / Pielstick de 850 kW (puissance en propulsion surface et schnorchel). Un moteur électrique principal de 3000 CV. Un moteur électrique de croisière de 32 CV. Une ligne d'arbre (une hélice).

 

ARMEMENT                          Quatre tubes lance-torpilles d'étrave (avant), et vingt torpilles de réserve.

 

IMMERSION                         Jusqu'à 300 mètres.

 

AUTONOMIE                       45 jours

 

NUMÉRO DE COQUE           S621

 

EFFECTIF                            58 hommes soit 7 officiers, 31 officiers mariniers et 20 hommes d'équipages.

Les zones d'évolution de l'équipage sont les suivantes :

- une coursive centrale (environ un mètre de large) véritable épine dorsale du bâtiment, - un centre opération d'où est dirigé le bâtiment,

- des postes (logements) pour sept ou huit hommes,

- une cuisine "lilliputienne" et sa "cambuse",

- un "carré" officiers de 1,5 mètres sur 3,

- un local sanitaire avec une douche (" vous savonnez les parois, puis vous entrez et vous suivez les mouvements du navire, vous ressortez propre comme un sous neuf'3),

- un compartiment machines, où les mécaniciens doivent s'adapter à l'étroitesse des lieux,

- le local torpille où l'on trouve les armes dans leur berceau, et en l'absence d'une ou deux de ces dernières, quelques membres d'équipage venus y installer leur quartier,

- le kiosque rempli d'appareillages divers (périscopes, antennes), indispensables à la bonne marche du navire, est dominé par la "baignoire" d'où il fait bon venir respirer l'air du large. On peut aussi stationner juste en dessous de cette partie découverte et la transformer en fumoir, les inconditionnels de l'herbe à Nicot le savent bien.

La claustrophobie, l'asocialité sont à bannir dans ce lieu : la promiscuité est telle qu'il faut que chacun y mette du sien pour que règne en permanence une heureuse harmonie. Tous ceux qui ont vécu une expérience à bord de ce type de bâtiment vous diront qu'une exceptionnelle entente s'y développe, que la camaraderie n'est pas un vain mot. Les périodes d'activités opérationnelles de onze semaines, tout comme les cinq semaines de période d'entretien, permettent de renforcer cette cohésion interne.

 

Affecté dans un premier temps à l'Escadrille des sous-marins de la Méditerranée (ESMED à Toulon), il passe le 5 juillet 1984 à L'Escadrille des sous-marins de l'Atlantique (ESMAT à Lorient), et enfin il rallie en juillet 1996, l'ancienne base sous­marine de l'arsenal de Brest. Conçu pour servir jusqu'en 2002, mais atteint par la réforme de l'armée française et les restrictions budgétaires, il doit après plus de vingt ans de service, être mis en réserve en février 1998, en attendant la date fatidique de son désarmement. C'est donc pour la neuvième et dernière fois qu'il rend visite à sa marraine et à ses habitants. Avec son retrait du service actif prend fin une merveilleuse aventure, un parrainage pas comme les autres, mais il y a fort à parier que longtemps encore, nombreux seront ceux qui garderont un souvenir ému des visites du Béveziers, de cette silhouette furtive se glissant silencieusement sur les eaux du canal, dans l'humidité d'un petit matin normand. Bien que gravé dans le coeur des Caennais, son nom demeure très énigmatique.

Car avec ce retrait ce n'est pas uniquement une unité de la Marine nationale, un parrainage original, un nom curieux, qui disparaissent, c'est un pan d'histoire maritime.

;Propos recueillis auprès d'un Commandant du Béveziers.

4-

 

 

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II) La bataille de Pevensey.

 

J. Meyer, historien qui a rédigé en 1993 une publication, confirme dans sa préface la difficulté qu'il y a à se procurer des renseignements sérieux sur l'origine du nom. A l'aide des informations des différents manuels et dictionnaires, des nombreuses revues maritimes, des revues historiques, des archives du Musée de la Marine et du livre d'or du bâtiment, on découvre enfin une victoire navale française.

Entre 1686 et 1697, le Royaume de France doit faire face à une puissante coalition européenne, connue sous le nom de Ligue d'Augsbourg. Parallèlement aux combats terrestres se déroule une guerre navale opposant les puissantes escadres françaises et anglo-hollandaises. La Manche est un des cadres majeurs de cet affrontement, et Anne Hilarion de Costentin, plus connu sous le nom de Comte de Tourville, s'y illustre particulièrement- Il réussit, enjuillet 1689, venant de Toulon avec une vingtaine de vaisseaux, à forcer le blocus anglais mis en place devant Brest. Promu vice-amiral du Levant le ler novembre 1689, il hisse son pavillon sur le Soleil Royal (98 canons) et prend le commandement d'une Armée navale de 70 vaisseaux de ligne (plus de 44 canons), 5 frégates, 16 brûlots. Sur les pressantes instructions du Marquis de Seignelay (fils de Colbert), Secrétaire d'état à la Marine, il quitte Brest le 23 juin 1690 pour chercher et combattre la flotte combinée anglo-hollandaise (" Sa Majesté veut qu'il les combatte en quelque nombre qu'ils soient, qu'il les poursuive jusque dans leurs ports"). Autour de lui se trouve une pléiade de grands marins: son avant-garde est commandée par le lieutenant général Château-Renault (Le Dauphin Royal de 110 canons), son arrière-garde par le vice-amiral d'Estrées (Le Grand de 90 canons). Les officiers supérieurs sont Villette-Mursay, d'Amfreville, Gabaret, Relingue, Nesmond, Coétlogon, Flacourt, Jean Bart, La Galissonnière, Pointis, La Harteloire.

 

Au matin du 10 juillet 1690, la flotte ennemi s'avance pour engager le combat contre les Français : "un des points les plus remarquables de la côte sud d'Angleterre est un promontoire escarpé situé entre Brighton et Hastings. Formé par de hautes falaises crayeuses, ce cap est appelé par les Anglais Beachy Head. C'est un amer remarquable et nos marins, qui le connaissaient bien, l'appelaient dès le XVII siècle, à l'imitation peut­être des Hollandais, le cap Bévesier; ce vocable étant une déformation (linguistique) du nom d'un petit port voisin : Pevensey", peut-on lire sur le livre d'or du sous-marin. Ironie de l'histoire ou non, ce nom apparaissait déjà dans les chroniques anciennes, puisque c'est dans cette baie, dans le petit port de Pevensey, que le 29 septembre 1066 Guillaume le Conquérant débarqua.

L'amiral anglais Herbert (Comte de Torrington) commande une flotte de 57 vaisseaux de ligne, dont 22 Hollandais qui constituent l'avant-garde, sous les ordres de l'amiral Evertzen. L'arrière-garde reste sous la direction de l'amiral anglais Delawal. Comme dans toutes les autres batailles navales, la concentration d'artillerie est formidable. Les Français alignent 28 000 hommes et 4 624 canons, les Anglo-Bataves 23 000 hommes et 3 842 pièces. En dépit de la supériorité numérique affichée par la France, la Cour anglaise a donné l'ordre formel, au commandant en chef de la flotte combinée, d'engager le combat.

 

Selon l'ordre habituel de bataille, les deux flottes combattent en ligne de file (deux lignes parallèles), l'objectif étant de rompre la ligne adverse. Les premiers coups de canons sont tirés vers 8h30 au niveau des avant-gardes. Les 22 navires hollandais engagent furieusement les 22 bâtiments de Château-Renault. Mais leur vaisseau de tête ne se trouve qu'à la hauteur de notre neuvième, de sorte que les huit premiers n'ayant pas d'adversaires peuvent, sous les ordres du Marquis de Villette, gagner au vent et contourner l'ennemi. Les Hollandais se trouvent pris entre deux feux. Au centre l'amiral Herbert fait preuve d'un attentisme déconcertant, surtout pour ses alliés. Le Soleil Roval de Tourville a comme adversaire La Sandwich4 du commandant Ashby, qui, rapidement désemparé, se fait remorquer hors de la ligne par ses chaloupes. A l'arrière-garde l'amiral Delawal sur La Coronation dirige avec fougue ses navires de 70 à 80 pièces contre d'Estrées, et particulièrement contre ses plus petits bâtiments (50 à 60 pièces). Toutefois la ligne de file est maintenue, et seul Le Terrible durement touché par une bombe qui fait sauter sa poupe, de la Sainte-Barbe à la Dunette, doit être éloigné.

A 11 heures, sur l'ensemble du dispositif de combat, les Français ont l'initiative. Vers 14 heures, l'amiral Herbert décide de rompre le contact. Pendant ce temps les Hollandais se font durement malmener. A 15 heures, profitant du vent, des brûlots sont lancés contre les Français, sans succès: ils furent tous coulés avant d'avoir pu occasionner des dégâts. Petit à petit la brise faiblit, puis vers 17 heures le "juzant"5 fait sentir ses effets, ce qui reste de la flotte Anglo-Batave mouille immédiatement, tout en maintenant sa voilure. Cette ruse, éventée trop tardivement par Tourville, sauve nos ennemis. En effet, avant qu'un ordre identique soit donné aux navires français, ces derniers sont déportés vers l'ouest.

Selon J. Meyer, la canonnade a duré environ 8 heures pour les bâtiments les plus engagés, et les Français ont tiré 87 000 coups de canon. Le soir du 10 juillet 1690, le vice-amiral Tourville est maître de la Manche sans avoir perdu aucun bâtiment. Cinq vaisseaux hollandais sont rasés, deux en train de couler, une douzaine désemparés se font remorquer par leurs chaloupes. Les amiraux Van Wallenburgh et Van der Putten sont morts au combat.

La poursuite engagée sur les jours suivants, alourdit le bilan du côté batave. L'amiral Herbert se replie en désordre en direction de la Tamise. Un de ses navires6, gravement avarié, est obligé de se jeter à la côte et de se brûler. Il ramène une dizaine de navires

4 Le ou La Sandwich : en principe le nom d'un navire britannique est du genre féminin. 

5'Courant de marée descendant, orthographié selon l'écriture de l'époque.

 6 11 s'agit de L'Anne.

gravement touchés, mais l'essentiel de son Armée navale rentre intacte. En remontant l'estuaire de la Tamise il prend soin de détruire le balisage.

 

Au total, les coalisés perdirent 17 unités. Dans la capitale anglaise, on craint le pire, l'affolement gagne la population et l'historien britannique Macaulay peut écrire

"il n'v eut pas de journée plus triste dans les annales de Londres", et "il fut un long temps avant qu'un seul navire anglais osât s'aventurer à montrer la croix de Saint Georges dans le canal qui sépare l'Angleterre et la France". La Tour de Londres est tout juste assez bien gardée pour éviter à Herbert d'être lynché(7). Le décompte des pertes humaines est difficile à faire: les Anglais avouent une centaine de tués, les Hollandais vraisemblablement 2000 morts. Tourville annonce 344 morts, 811 blessés, cependant, dés le 17 juillet, il doit débarquer au Havre plus de 2000 malades et 6000 lorsqu'il arrive le 17 août à Brest.

 

En dépit d'une mauvaise exploitation militaire de ce succès, le Roi Louis XIV fit chanter un Te Deum à Notre Dame et frapper une médaille commémorative. Celle-ci se trouve au Musée de la Marine à Paris, elle porte comme inscription : "Mersa et fugata Anglorum et Batavorum classe ad oras Angliae M.DC.XC." (La flotte Anglo-Batave coulée et dispersée sur les côtes d'Angleterre 1690).

 

Curieusement, l'histoire de France n'a pratiquement pas retenu ce fait d'arme, plus curieusement encore, nos différentes Marines (Royales, Impériales et Nationales) ne semblent pas avoir voulu honorer de façon particulière cette réussite, avant le vingtième siècle.

7 -L'amiral Herbert fut traduit devant une Cour martiale et acquitte.

 

http://jlvlino.free.fr/agaasm/page6.htm

 

 

 

 

 

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